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L'écho - 16/04/2013
Conflits d'une génération sacrifiée

Bleu Bleu dresse le portrait d'une époque et d'une génération. Celle du Grunge dont Stéphane Arcas a bien humé l'air, même si sa chanson est un peu longue.

Au milieu d'un appartement clashé de peinture et méticuleusement sacragé, vivotent trois aspirants artistes toulousains allumés : Hades, un grand corbeau halluciné entre Nick Cave, Thurston Moore et Mathieu Amalric; Nico, genre skateur à bonnet; et enfin Manu, jeune Jésus en gillet de laine dont la gueule d'ange rappelle aussi Kurt Cobain. 

Ces trois-là, flanqués de leurs copines resignées, préparent une nouvelle expo au concept révolutionnaire. Plutôt que de créer sous mauvaise dope, ils vont eux-mêmes vendre de la drogue afin de financer leurs petits films - des portraits de leurs clients et des dealers - qui passeront dans la future exposition : un joli tableau de l'état d'esprit des années nonante, un "ready-made qui feruit le trait d'union entre Marcel Duchamp et Pablo Escobar".

Sauf que le fournisseur de came exigera sognon en temps et en heure. Et afin de s'assurer que tout se déroule selon les lois du "commerce", il charge son gorille de surveiller les agissements de ces petits branleurs...

"Bleu Bleu" décortique le mouvement grunge (littéralement, "saleté") et s'offre une plongée dans les années nonante, décennie de la génération X que l'on a dit sacrifiée. Celle de la guerre (du Golfe) en direct à la télé, de la fin des "Trente piteuses", reflet d'une jeunesse sans repères et sans illusions conçue par l'espoir et qui se retrouve à vingt ans mal fringuée par l'indifférence.

L'univers à la Bret Easton Ellis de Stéphane Arcas, qui signe également la mise en scène, est opportunément saupoudré (sans mauvais jeu de mots) d'une étrange substance... comique et de références musicales d'époque : Sonic Youth, Dinosaur Jr ou bien sûr Nirvana. 

C'est heureux, car la succession des monologues et autres récits de trips, interrompue par quelques échanges, rend l'exercice trop monocorde. Et malgré le talent des dix jeunes acteurs, celui de Michel Cloup dont les morceaux des guitare grasse à la Lee Ranaldo secouent la salle, ce tableau d'une génération perdue qui macère dans un confit de désoeuvrement déteint sur le spectateur. Par moments, il s'ennuie aussi un peu...

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